Ce virus qui nous tient au corps, au coeur, aux mains et au visage !
Houyet, samedi 13 novembre. Des quatre coins de Wallonie arrivent des gens portant des sacs énigmatiques, des valises au contenu secret, des lampes de chevet, des masques pour les yeux, des bancs et maisons miniatures, un arrosoir, des jeux pour enfants, des pupitres et des tenues éclectiques. Ils sont vaillants et pleins d’énergie malgré le trajet accompli et la triste journée de novembre du côté de la météo. Qu’est-ce qui les anime pour venir de si loin : Cuesmes, La Louvière, Verviers et d’un peu plus près : Rochefort ?
Pas de test à l’entrée, ni de scan du Covid Safe Ticket et donc moins de 50 personnes ! L’hôte du jour et les acteurs de la journée1 en ont décidé ainsi pour permettre à chacun d’être présent. Ils arrivent les yeux brillants, ont une allure incertaine comme s’ils avaient déjà la tête ailleurs, parlent plus fort que la normale. Certains ont l’air stressé comme s’ils avaient une boule au ventre pendant que d’autres transpirent alors qu’il ne fait pas chaud. C’est suspect, que nous cachent-ils ?
Après vérification des symptômes, le diagnostic est sans appel : ils sont bel et bien atteints du virus. Il n’y a qu’un seul endroit où l’on peut les confiner : la pièce sombre du fond, où personne ne va jamais, en coulisse ! Mais combien de temps y resteront-ils ? Pas très longtemps car ce virus de la « théâtrite actionnante » les attire de manière irrémédiable vers la scène où ils sont attendus avec impatience. Celui-ci est faiblement contagieux, mais une fois que tu l’as attrapé, il est extrêmement difficile de s’en débarrasser pour le plus grand plaisir des spectateurs. En effet, une fois sur le devant de la scène, les symptômes sont variés et différenciés en fonction de la localité d’origine.
Le variant Nu : Il est apparu à Verviers et a contaminé tout un immeuble. Ils sont masqués sur scène de sorte que l’on ne voit pas le haut du visage ; seule la bouche est découverte et les langues se délient. Les gens qui en sont atteints se méfient les uns des autres et vivent de manière isolée dans leur appartement. Naissent alors les préjugés et toute réunion ou dîner d’immeuble se termine par un fiasco. Arriveront-ils à se rapprocher et faire tomber les masques pour mettre à nu leurs points communs dans la différence ? Pour cela, il faudra la force de conviction de l’animatrice d’atelier pour qu’ils restent sur scène. (voir photo ci-dessus)
Le variant Micron : Il a été conçu dans un laboratoire près de Mons lors d’une formation d’été et libéré à Houyet. Il transforme les objets en êtres animés aux comportements humains. Ici, deux bancs miniatures qui se méfient l’un de l’autre en arrivent à dresser des murs entre leurs deux maisons. Tomberont-ils dans le gouffre ?
Le variant Lupus : Né à La Louvière et grandissant durant cette période où les liens sont entravés, il empêche les habitants de sortir de leur caverne et de voir le loup. Ces liens qui nous font tant de bien au moral, seront-ils préservés ou enfermés par la solitude ?
Le variant Alpha : Il a une histoire de plus de 20 ans à Cuesmes et donne ici aux comédiens une capacité à décoder les mécanismes de l’austérité, à en décrire avec exactitude les dérives et les dangers pour nos acquis sociaux. Ils n’en perdent pas pour autant le goût pour la satire et l’absurde et l’on respire à pleines narines un texte d’expérience.
Le variant Beta : Suite aux errements du gouvernement, il atteint tous ceux qui sont mandatés pour faire partie de la Brigade d’intervention du Bonheur. Pour rendre le bonheur au peuple, ils n’hésitent pas à se transformer en êtres mystérieux, loufoques, burlesques ou attendrissants. Ces forces multicolores ont le pouvoir de faire ressortir vos richesses intérieures. L’effet secondaire le plus récurrent est le décrochement de la mâchoire, vous voilà prévenus !
A chaque virus ou variant, ses experts ! Ici, ce sont les comédiens eux-mêmes qui peuvent s’exprimer. Ils sont répartis dans quatre tables rondes pour exprimer leur parcours et leur vécu dans les différents ateliers de Théâtre-Action (en majorité issus des Equipes Populaires).
• Qu’est-ce qui vous a donné envie de faire du théâtre-action ?
• D’un point de vue personnel, qu’est-ce que ça vous a amené,
a changé ?
• Quelles sont les actions collectives ou évolutions qui en ont
émergé ?
• Ensemble, on pourrait aller plus loin… Je rêve de…
Une journée riche de ses rires, de ses applaudissements, de ses rencontres et des paroles récoltées. Mon petit doigt me dit que cela n’en restera pas là et que les variants se croiseront de nouveau..
1. Organisateur : la Compagnie Buissonnière, avec les acteurs de la journée (le CTA, la Compagnie du Campus, le Théâtre des Rues et les Equipes Populaires)