[REVUE] Dernière parution : DES ELECTIONS… SANS CONVICTION(S) ?
EDITO : POUR LA BEAUTÉ DU GESTE ?
Guillaume Lohest, rédacteur en chef
Impossible de l’ignorer, le battage médiatique a commencé : en 2024, on va voter ! Cinq niveaux de l’immeuble démocratique sont concernés. On commencera par les étages supérieurs lors du triple scrutin du dimanche 9 juin : l’Europe, le fédéral et les régions. Le rez-de-chaussée et ses abords, commune et province, ce sera pour l’automne, le 13 octobre.
Voter, au fond, c’est un geste simple. On glisse un bulletin dans l’urne, c’est déjà fini. On peut rentrer chez soi et, en fin d’après-midi, guetter l’annonce des premières tendances, traquer les résultats qui tombent au compte- gouttes. Ou s’en foutre, comme de plus en plus de citoyennes et de citoyens qui n’y croient plus. Cette indifférence, cette méfiance, voire ce dégoût ne sont pas un phénomène anodin. C’est devenu une logique fondamentale de nos démocraties.
À ce sujet, la pratique de l’éducation populaire est encore plus fiable que les plus sûrs des sondages d’opinion. L’immeuble démocratique se fissure de toutes parts. Plus c’est haut, plus les mots sont durs. L’Europe, pour certains, est le repoussoir ultime, la moisissure la plus aboutie. Car c’est bien le vocabulaire utilisé : on parle de « pourris ». Seul le niveau communal semble échapper, en partie, à cet opprobre généralisé.
J’exagère ? Peut-être. Il faut l’espérer, sans quoi les résultats des élections à venir, en Belgique et dans le monde, auront des allures de changement de régime. L’Europe, déjà tellement fragilisée, pourrait prochainement ressembler à un édifice en ruines, lorgnée de tous côtés par les mafias de vieux entrepreneurs véreux : Trump, Poutine et ceux qui leur servent la soupe en Hongrie, en Allemagne, en France, au Portugal, en Flandre et ailleurs… Avec l’aide des réseaux sociaux et de l’intelligence artificielle. À qui va-t-on donner les clés de l’immeuble ?
Nous n’en sommes pas là. Il reste des forces démocratiques en débat. Bien sûr, elles sont prises dans ce jeu insupportable du marketing électoral. Conscientes des risques, elles se lancent parfois dans des paris improbables, prêtes à (presque) tout pour capter des bulletins de vote à droite à gauche, surtout à droite, ou pour rafistoler un électorat perdu. Ces contorsions électoralistes rendent le débat très confus et en ajoutent à la suspicion.
À quoi s’en tenir ? Vu l’état de la maison, nous devons rester en habits de chantier. Pour tenter de maintenir au moins la charpente debout et s’atteler à tous les travaux de rénovation nécessaires. Avec l’aide de nos outils pour indiquer la gauche et la droite, le bas et le haut, le juste et l’injuste. Et puisque nous avons cette chance, nous irons voter. En espérant que ce ne soit pas seulement pour la beauté du geste.
Consultez le dossier en ligne : Revue Contrastes Mars – Avril 2024