Le féminisme sur tous les fronts (Contrastes, juin 2019)
LA PAROLE SE LIBÈRE
Contrairement à l’image dépassée que l’on se fait du féminisme et des féministes, la conquête de l’émancipation et de l’autonomie des femmes est multiforme et connaît un coup d’accélérateur, en particulier depuis les récents scandales d’abus sexuels et autres violences faites aux femmes dans la sphère publique et privée.
Comme le souligne Irène Kaufer dans une carte blanche publiée dans Le Soir du 4/06/2019 en réponse à un courant féministe radical #stopauxsalauds, « s’il arrive que nous ayons des divergences, eh bien, c’est justement ce qui fait la richesse d’un mouvement qui n’est pas une secte, ni un parti avec un programme défini, mais un chemin qui se construit en marchant ».
Ce chemin, il est en construction depuis près de 200 ans en Belgique et il n’est pas linéaire. Comme l’explique Marie-Thérèse Coenen, des courants divers ont traversé l’histoire du féminisme, dont la principale fracture est celle qui distingue les mouvements féminins (qui prônent l’égalité des droits) et les mouvements féministes (qui veulent l’abolition du système patriarcal).
Dans un futur proche ou lointain, les historiens se pencheront sûrement sur les raisons plus profondes de l’explosion actuelle des courants et mouvements féministes, mais aussi la diversification des combats qui s’expriment aujourd’hui. La parole se libère : de celles qui subissent des violences conjugales, qui sont méprisées parce qu’elles portent le voile, qui sont discriminées parce qu’elles sont lesbiennes, qui sont victimes de la « grossophobie », qui gagnent 20% de moins que leurs collègues masculins, qui subissent la charge mentale des tâches quotidiennes…
Mais le féminisme ne pourra crier victoire que quand toutes les femmes auront accès aux mêmes droits, y compris les moins favorisées. C’est ce que défend notamment le Collectif des 99%, qui accuse le « féminisme néolibéral » de sacrifier les femmes racisées et pauvres pour assurer leur propre ascension sociale. En matière d’inégalités socio-économiques, le nouveau mouvement de « grève des femmes » pour dénoncer les inégalités sur le marché de l’emploi remet également cette question des inégalités socio-économiques à l’agenda.
Les champs d’investigation du féminisme sont encore multiples et l’union sacrée entre tous les courants féministes est peu vraisemblable tant les débats sont vifs et les positions tranchées. Ce qui est sûr, c’est que, comme le souligne Irène Kaufer, « il n’y a pas de bon ou de mauvais féminisme, il y a juste un combat dans toute sa diversité, pour le droit des femmes ».
Sommaire
p3 – Courants féministes. Les racines du féminisme contemporain
Le mouvement féministe est un mouvement social qui lutte collectivement contre les discriminations faites aux femmes, qui vise à instaurer l’égalité entre les hommes et les femmes et à garantir leur émancipation et autonomie. La méthode pour atteindre ce but diverge selon les composantes du mouvement.
p6 – Violences. L’engrenage infernal
Comme dans un engrenage infernal, les multiples formes de violences s’articulent. Ces violences relèvent toutes d’un même mécanisme de pouvoir
qui permet de maintenir les privilèges des hommes au détriment des droits, de l’intégrité et de l’autonomie des femmes.
p.8 – Interview. Pour la libération de toutes les femmes
Seyma Gelen, fondatrice du collectif féministe Kahina en appelle à un féminisme tolérant. Elle plaide pour un féminisme décolonial, une ouverture d’esprit et une libération de toutes les femmes sans exception. Que toutes soient prises au sérieux, aient accès à la parole, soient entendues. Entretien.
p.13 – Corps. Un jour le sang a coulé…
Harcèlement de rue, harcèlement sexuel, droit à l’avortement remis en question, (re)définition du consentement… Le corps des femmes revient sur le devant de la scène et conduit ces dernières à se réapproprier un corps trop souvent déformé, malmené, contenu dans le regard des autres.
p.16 – Charge mentale. La chaussette qui traîne est politique
La charge mentale est un sentiment diffus partagé par une grande majorité
des femmes d’être toujours débordées et de devoir être seules à penser à tout
dans la gestion quotidienne du ménage. Une charge mentale qui s’ajoute à celle bien mesurable de l’inégale répartition du temps consacré aux tâches ménagères et parentales.
p.18 – Langue française. Le masculin n’est pas neutre
Le masculin l’emporte” disent les règles de grammaire. Mais est-ce juste une question de grammaire ? Doit-on considérer que le langage est un domaine bien à part, sans véritable lien avec le sexisme et le rapport de domination subi par les femmes dans nos sociétés patriarcales ?
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