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Les hôpi­taux sous tension (Contrastes Sept.-Oct. 2019)

Un profond malaise

(La revue est télé­­­­­­­­­­­­­­­­­­­­­­­­­­­­­­­­­­­­­­­­­­­­char­­­­­­­­­­­­­­­­­­­­­­­­­­­­­­­­­­­­­­­­­­­­geable en bas de page.)

A l’heure où vous lisez ces lignes, vous aurez sans doute entendu la colère des blouses blanches expri­­­­­­­mée dans les rues et les hôpi­­­­­­­taux ce 24 octobre dernier. Ce mouve­­­­­­­ment de grève et de mani­­­­­­­fes­­­­­­­ta­­­­­­­tions a été lancé il y a quelques mois par la CNE, rejointe par d’autres syndi­­­­­­­cats, asso­­­­­­­cia­­­­­­­tions de profes­­­­­­­sion­­­­­­­nels de la santé, de défense des patients, mutuelles, regrou­­­­­­­pés au sein du Collec­­­­­­­tif Santé en lutte.

La mobi­­­­­­­li­­­­­­­sa­­­­­­­tion monte d’un cran mais la colère gronde depuis plusieurs années dans le secteur des soins de santé (hôpi­­­­­­­taux, maisons de repos, soins à domi­­­­­­­ci­­­­­­­le…). En cause, un défi­­­­­­­nan­­­­­­­ce­­­­­­­ment  récur­rent alors que les besoins en matière de santé ne cessent de croître et une réforme des hôpi­­­­­­­taux enta­­­­­­­mée par Maggie De Block en 2015 qui fait peser sur le person­­­­­­­nel médi­­­­­­­cal la ratio­­­­­­­na­­­­­­­li­­­­­­­sa­­­­­­­tion des infra­s­­­­­­truc­­­­­­­tures et des séjours en hôpi­­­­­­­tal.

Comme en témoigne le person­­­­­­­nel soignant, les condi­­­­­­­tions de travail deviennent très diffi­­­­­­­ciles et la pénu­­­­­­­rie de person­­­­­­­nel se fait sentir. Le Collec­­­­­­­tif Santé en lutte a rédigé un cahier de reven­­­­­­­di­­­­­­­ca­­­­­­­tions qui sera le fil conduc­­­­­­­teur de ses futures actions  auprès des pouvoirs publics et des direc­­­­­­­tions d’hô­­­­­­­pi­­­­­­­tal.

La pres­­­­­­­sion sur les blouses blanches a des consé­quences inévi­­­­­­­tables sur la qualité des soins, le bien-être et le porte­­­­­­­feuille des patients hospi­­­­­­­ta­­­­­­­li­­­­­­­sés ; chacun d’entre nous a vécu ou a entendu autour de lui des témoi­­­­­­­gnages confir­­­­­­­mant cette réalité.

Avec l’aug­­­­­­­men­­­­­­­ta­­­­­­­tion des supplé­­­­­­­ments d’ho­­­­­­­no­­­­­­­raires (et des assu­­­­­­­rances hospi­­­­­­­ta­­­­­­­li­­­­­­­sa­­­­­­­tion, les deux étant liés), c’est clai­­­­­­­re­­­­­­­ment la méde­­­­­­­cine à deux vitesses qui prend un coup d’ac­­­­­­­cé­­­­­­­lé­­­­­­­ra­­­­­­­teur, avec la compli­­­­­­­cité affi­­­­­­­chée des hôpi­­­­­­­taux qui misent sur ces supplé­­­­­­­ments pour compen­­­­­­­ser la baisse des subsides publics.

Pour de nombreux acteurs de la santé, il faut revoir le système de finan­­­­­­­ce­­­­­­­ment des hôpi­­­­­­­taux, et suppri­­­­­­­mer à terme les supplé­­­­­­­ments d’ho­­­­­­­no­­­­­­­raires qui sont au cœur de la priva­­­­­­­ti­­­­­­­sa­­­­­­­tion des soins de santé.

Pour Jean-Philippe Cobbaut, direc­­­­­­­teur du Centre d’éthique médi­­­­­­­cale de Lille, l’éthique clinique doit prendre en compte l’évo­­­­­­­lu­­­­­­­tion des nouvelles tech­­­­­­­no­­­­­­­lo­­­­­­­gies mais aussi le fonc­­­­­­­tion­­­­­­­ne­­­­­­­ment du système de soins et les pratiques de terrain. Elle doit égale­­­­­­­ment permettre de mieux comprendre les méca­­­­­­­nismes par lesquels les personnes n’ont pas accès aux soins et les porter à la connais­­­­­­­sance des respon­­­­­­­sables hospi­­­­­­­ta­­­­­­­liers et poli­­­­­­­tiques.

Le ras-le-bol des blouses blanches répond à une exigence légi­­­­­­­time et essen­­­­­­­tielle dans une société démo­­­­­­­cra­­­­­­­tique ; celle du respect de la vie et de la dignité humaine. Celles des patients comme celles des travailleurs du secteur.

Monique Van Dieren

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