ACCES AUX DROITS SOCIAUX : UN COMBAT QUOTIDIEN ( Contrastes mars- avril 2022)
LA TROISIÈME VOIE EST UNE VOIE SANS ISSUE
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« Les Etats […] reconnaissent le droit de toute personne à un niveau de vie suffisant pour elle-même et sa famille, y compris une nourriture, un vêtement et un logement suffisants, ainsi qu’à une amélioration constante de ses conditions d’existence »1. Les droits sociaux (droit au travail, au logement, à la santé, à la sécurité sociale, etc.) sont des droits humains fondamentaux. Ils sont la condition de jouissance de tous les autres droits humains : « L’idéal de l’être humain libre, libéré de la crainte et de la misère, ne peut être réalisé que si des conditions permettant à chacun de jouir de ses droits économiques, sociaux et culturels, sont créées »2. Les droits sociaux ne peuvent donc être réalisés que si les pouvoirs publics mettent en place les mécanismes pour que toutes et tous puissent y avoir accès.
Pourtant, loin d’être automatique, accéder à ses droits sociaux implique bien souvent de devoir adopter une posture de combat. Absence ou manque d’informations, complexification des procédures, conditionnalité toujours plus poussée des droits, etc. : ce numéro de Contrastes détaille les raisons qui expliquent pourquoi un nombre sans cesse croissant d’individus sont exclus de leurs droits sociaux.
Le non-recours aux droits sociaux, d’une ampleur désormais pandémique, est un phénomène relativement récent. Il s’est renforcé avec l’instauration de l’« Etat social actif » en 1999, variante belge de ce que le Premier ministre britannique Tony Blair appelait « la troisième voie », « par delà la gauche et la droite ». L’objectif affiché de ce nouvel Etat social (que Tony Blair appelait aussi « Etat social positif ») était de briser les prétendus réflexes d’attente passive d’une indemnisation, chez les citoyens affectés par les aléas de la vie. Pas de droit sans responsabilité, pourrait résumer cette nouvelle vision. Désormais donc, si quelqu’un veut bénéficier de ses droits sociaux, il doit « faire des efforts », « prouver qu’il veut s’en sortir ». Mais peut-on réellement s’en sortir quand on n’a pas accès à ses droits ?
Cet « Etat social actif » est un produit de la philosophie néolibérale, aujourd’hui dominante dans le champ politique. Une de ses caractéristiques est d’étendre l’emprise des mécanismes et des logiques du marché à l’ensemble de la vie. Elle a donc notamment pour conséquence la disparition de la solidarité collective vis-à-vis de toutes et tous, au profit de la responsabilité individuelle. Une tendance combattue depuis toujours par les Equipes Populaires. Quoi de plus logique, donc, de choisir le non-recours aux droits sociaux comme thématique de campagne pour cette année 2022. Une thématique qui résume la disparition des solidarités collectives et qui cristallise cette violence institutionnelle contre laquelle notre mouvement n’aura de cesse de s’attaquer.
Samuel Legros
1. ONU, Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, article 11, §1.
2. Idem, préambule.
SOMMAIRE
p3. Accès aux droits sociaux : un combat à armes inégales
p7. De quels droits parle-t-on ?
p11. Interview : Céline Nieuwenhuys « Le droit à l’assistance a disparu »
p15. L’automatisation des droits, en voie de concrétisation ?
p19. Un Etat social très actif…dans la chasse à la fraude sociale
Prix au n° : 4€ + les frais d’envoi
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