Analyses

UN FOURNISSEUR PUBLIC : UNE MESURE D’ÉCOLOGIE POPULAIRE POUR CONTRER LA PRÉCARITE ÉNERGÉTIQUE ! (Juillet 2024)

Le marché tel qu’il est orga­­­­­­­nisé aujourd’­­­­­­­hui semble inca­­­­­­­pable de répondre au besoin et au droit fonda­­­­­­­men­­­­­­­tal d’ac­­­­­­­cès à l’éner­­­­­­­gie. En effet, en Belgique 21,8% des ménages sont en situa­­­­­­­tion de préca­­­­­­­rité éner­­­­­­­gé­­­­­­­tique en 2022, chiffre en augmen­­­­­­­ta­­­­­­­tion par rapport aux années précé­­­­­­­dentes (voir Baro­­­­­­­mètre 2024 de la préca­­­­­­­rité éner­­­­­­­gé­­­­­­­tique de la Fonda­­­­­­­tion Roi Baudouin). Derrière ce pour­­­­­­­cen­­­­­­­tage géné­­­­­­­ra­­­­­­­liste, les situa­­­­­­­tions sont très contras­­­­­­­tées selon la caté­­­­­­­go­­­­­­­rie du ménage, certaines étant plus impac­­­­­­­tées que d’autres : les ménages à faibles reve­­­­­­­nus sont mieux proté­­­­­­­gés grâce aux aides sociales mises en place lors de la crise éner­­­­­­­gé­­­­­­­tique, tandis que les ménages appar­­­­­­­te­­­­­­­nant à la classe moyenne ne sont plus néces­­­­­­­sai­­­­­­­re­­­­­­­ment proté­­­­­­­gés aujourd’­­­­­­­hui : 43% des ménages appar­­­­­­­te­­­­­­­nant à la classe moyenne « basse » souffrent de préca­­­­­­­rité éner­­­­­­­gé­­­­­­­tique. Les familles mono­­­­­­­pa­­­­­­­ren­­­­­­­tales et les isolés sont les plus vulné­­­­­­­rables (37%), de même que les loca­­­­­­­taires (45,5% pour les loca­­­­­­­taires sociaux, 33% pour les loca­­­­­­­taires privés, contre 15% des proprié­­­­­­­taires).

Bref, la préca­­­­­­­rité éner­­­­­­­gé­­­­­­­tique touche de trop nombreux ménages, surtout au regard des profits engen­­­­­­­drés par le secteur. Car s’ils sont dans cette situa­­­­­­­tion, ce n’est
pas unique­­­­­­­ment pour un problème de revenu (la classe moyenne est aussi touchée par la préca­­­­­­­rité éner­­­­­­­gé­­­­­­­tique, rappe­­­­­­­lons-le) mais c’est, de notre point de vue plutôt dû à un problème de prix ! En effet, selon la CREG, un consom­­­­­­­ma­­­­­­­teur belge sur deux possède un contrat figu­­­­­­­rant parmi les 10 plus chers du marché !

Il y a donc urgence à régu­­­­­­­ler le secteur et plus préci­­­­­­­sé­­­­­­­ment les pratiques déloyales des four­­­­­­­nis­­­­­­­seurs privés qui cherchent à maxi­­­­­­­mi­­­­­­­ser leurs profits plutôt qu’à propo­­­­­­­ser un service public acces­­­­­­­sible à toutes et tous (Lire à ce sujet « Les four­­­nis­­­seurs privés : Pourquoi ça ne fonc­­­tionne pas? »). Le four­­­­­­­nis­­­­­­­seur public d’éner­­­­­­­gie que nous imagi­­­­­­­nons s’ins­­­­­­­crit dans la droite ligne de l’éco­­­­­­­lo­­­­­­­gie popu­­­­­­­laire parce qu’il tente de répondre à ces inéga­­­­­­­li­­­­­­­tés sociales tout en favo­­­­­­­ri­­­­­­­sant une éner­­­­­­­gie renou­­­­­­­ve­­­­­­­lable.

En effet, les personnes en situa­­­­­­­tion de pauvreté n’ont que trop peu accès aux initia­­­­­­­tives citoyennes alter­­­­­­­na­­­­­­­tives et écolo­­­­­­­giques telles que les commu­­­­­­­nau­­­­­­­tés d’éner­­­­­­­gie et les coopé­­­­­­­ra­­­­­­­tives, les achats grou­­­­­­­pés. Une four­­­­­­­ni­­­­­­­ture univer­­­­­­­selle et acces­­­­­­­sible à toutes et tous serait complé­­­­­­­men­­­­­­­taire aux initia­­­­­­­tives exis­­­­­­­tan­­­­­­­te­­­­s et permet­­­­­­­trait de pallier ce manque. Donc, d’aug­­­­­­­men­­­­­­­ter la consom­­­­­­­ma­­­­­­­tion d’éner­­­­­­­gie renou­­­­­­­ve­­­­­­­lable et/ou locale tout en luttant contre la préca­­­­­­­rité éner­­­­­­­gé­­­­­­­tique. Par ailleurs, il est indis­­­­­­­pen­­­­­­­sable de retrou­­­­­­­ver une forme de contrôle sur le type d’éner­­­­­­­gie que nous consom­­­­­­­mons et sa prove­­­­­­­nance.

Avec un four­­­­­­­nis­­­­­­­seur public d’éner­­­­­­­gie, nous serions en mesure d’exer­­­­­­­cer ce contrôle citoyen (Lire à ce sujet « Le contrôle citoyen : un enjeu fonda­­­men­­­ta­­­le­­­ment démo­­­cra­­­tique ») dans le but de tendre vers du 100% renou­­­­­­­ve­­­­­­­lable. Les profits engen­­­­­­­drés par ce four­­­­­­­nis­­­­­­­seur public seraient réinjec­­­­­­­tés, non pas vers ses action­­­­­­­naires, mais dans la lutte contre la préca­­­­­­­rité éner­­­­­­­gé­­­­­­­tique et pour la tran­­­­­­­si­­­­­­­tion juste, l’éner­­­­­­­gie renou­­­­­­­ve­­­­­­­lable. Et la boucle est bouclée !

Char­­­­­­­lotte Renou­­­­­­­prez, Contrastes Juillet 2024, p 22