Analyses

Chro­nique d’une crise annon­cée (Août 2023)

Muriel Vander­­­­­­­­­­­­­borght, Contrastes août 2023, p. 6 à 7

Au cours du prin­­­­­­­­­­­­­­­temps et de l’été 2022, les annonces se sont succédé : les prix de l’éner­­­­­­­­­­­­­­­gie de l’hi­­­­­­­­­­­­­­­ver à venir vont augmen­­­­­­­­­­­­­­­ter, un peu, beau­­­­­­­­­­­­­­­coup… énor­­­­­­­­­­­­­­­mé­­­­­­­­­­­­­­­ment. L’inquié­­­­­­­­­­­­­­­tude gran­­­­­­­­­­­­­­­dit, le pic de la crise approche et on parle d’un prix de gros multi­­­­­­­­­­­­­­­plié par 10… Malgré sa douceur météo­­­­­­­­­­­­­­­ro­­­­­­­­­­­­­­­lo­­­­­­­­­­­­­­­gique, l’hi­­­­­­­­­­­­­­­ver 2022–2023 sera rude pour tout le monde, et parti­­­­­­­­­­­­­­­cu­­­­­­­­­­­­­­­liè­­­­­­­­­­­­­­­re­­­­­­­­­­­­­­­ment pour les consom­­­­­­­­­­­­­­­ma­­­­­­­­­­­­­­­teurs les plus fragiles. Retour sur les moments-clés d’une crise dont il faudra tirer les leçons…

Une facture qui explose, le cas de Monsieur X
Avant la crise, Monsieur X payait 150 euros par mois pour le gaz et sa facture de régu­­­­­­­la­­­­­­­ri­­­­­­­sa­­­­­­­tion annuelle s’éle­­­­­­­vait à 450 euros. En octobre 2022, son contrat fixe passe en contrat variable. Avec la même consom­­­­­­­ma­­­­­­­tion, la projec­­­­­­­tion sur l’an­­­­­­­née lui prédit une facture de régu­­­­­­­la­­­­­­­ri­­­­­­­sa­­­­­­­tion annuelle de plus de 6500 euros. Ce qui signi­­­­­­­fie un coût mensuel de 540 euros supplé­­­­­­­men­­­­­­­taires. Pour faire face à ces augmen­­­­­­­ta­­­­­­­tions, Monsieur X peut comp­­­­­­­ter sur une indexa­­­­­­­tion sala­­­­­­­riale (mais celle-ci doit couvrir aussi l’aug­­­­­­­men­­­­­­­ta­­­­­­­tion géné­­­­­­­rale du coût de la vie) et sur 192 euros de chèques éner­­­­­­­gie par mois de novembre 2022 à avril 2023, soit envi­­­­­­­ron 1000 euros au total.
Source : « Prix du gaz, l’en­­­­­­­gre­­­­­­­nage infer­­­­­­­nal », Inves­­­­­­­ti­­­­­­­ga­­­­­­­tion, docu­­­­­­­men­­­­­­­taire audio diffusé sur La Première le 6 juillet 2023.

Pourquoi le prix de l’élec­­­­­­­tri­­­­­­­cité a-t-il suivi l’aug­­­­­­­men­­­­­­­ta­­­­­­­tion des prix du gaz ?
Aux heures où la consom­­­­­­­ma­­­­­­­tion éner­­­­­­­gé­­­­­­­tique est la plus impor­­­­­­­tante en Belgique, l’éo­­­­­­­lien et le nucléaire ne suffisent pas à répondre à la demande. Il faut alors faire appel aux centrales au gaz qui produisent de l’élec­­­­­­­tri­­­­­­­cité et c’est le prix de produc­­­­­­­tion de ces centrales qui déter­­­­­­­mine le prix global de notre élec­­­­­­­tri­­­­­­­cité. Cette règle sur laquelle se base le marché euro­­­­­­­péen est celle du « coût margi­­­­­­­nal de la dernière centrale appe­­­­­­­lée ». Elle oblige actuel­­­­­­­le­­­­­­­ment les produc­­­­­­­teurs à vendre leur éner­­­­­­­gie au prix (le même pour tout le monde) de la tech­­­­­­­no­­­­­­­lo­­­­­­­gie la plus chère, c’est-à-dire celle des centrales à gaz. Cela conduit à deux aber­­­­­­­ra­­­­­­­tions : les prix pour les consom­­­­­­­ma­­­­­­­teurs ont explosé alors que les coûts de produc­­­­­­­tion n’ont pas évolué pour le nucléaire et l’éo­­­­­­­lien ; les indus­­­­­­­tries du secteur éner­­­­­­­gé­­­­­­­tique qui produisent de l’élec­­­­­­­tri­­­­­­­cité sans utili­­­­­­­ser de gaz réalisent des profits fara­­­­­­­mi­­­­­­­neux.

Et demain ?
• Y aura-t-il une remon­­­­­­­tée des prix cet hiver ?
• L’hi­­­­­­­ver météo­­­­­­­ro­­­­­­­lo­­­­­­­gique sera-t-il clément comme celui de l’an­­­­­­­née dernière ?
• Comment la situa­­­­­­­tion de la guerre entre l’Ukraine et la Russie va-t-elle évoluer et influen­­­­­­­cer la vola­­­­­­­ti­­­­­­­lité des prix ?
• Les mesures d’aide seront-elles réac­­­­­­­ti­­­­­­­vées en cas de nouvelle envo­­­­­­­lée des prix ?