Le sens de la fête (Contrastes Nov.-Déc. 2019)
LE CŒUR À LA FÊTE, MALGRÉ TOUT…
Dans ma famille, comme dans les magasins, la fête de Noël débute le 1er novembre. Traditionnellement, nous profitons de la fête de Toussaint pour nous réunir joyeusement autour de la mémoire de nos parents… mais aussi pour préparer le réveillon de Noël. Chez qui va-t-on l’organiser ? Qui lance les invitations ? Qu’est-ce qu’on va manger et boire ? Qui apporte quoi ? C’est aussi le 1er novembre que l’on procède au fameux tirage au sort pour savoir à qui on va devoir offrir un cadeau. Eh oui, vu que nous sommes nombreux, nous limitons le budget-cadeaux en offrant (et donc en recevant) un seul cadeau par personne… On pense aussi à la vaisselle qu’il faut prévoir en quantité, à celui qui va s’occuper de la musique, à la manière dont on va se répartir les frais, etc.
Bref, les ingrédients de la grande majorité des fêtes sont réunis : célébrer un événement, suivre une tradition, se retrouver entre proches ou entre potes, manger (trop), boire (beaucoup), offrir des fleurs ou des cadeaux (pas trop chers), rire et raconter des blagues, écouter de la musique, danser. A la belle saison, le regain d’intérêt pour les festivals (en particulier chez les jeunes, mais pas que) est révélateur d’une évolution dans la manière de faire la fête. Mais l’envie de faire la fête, elle, reste inoxydable quels que soient nos latitudes, notre porte-monnaie et l’âge de nos artères.
Bien sûr, chaque médaille a son revers. Il y a les inévitables dérapages tels qu’abus d’alcool, disputes de famille, mouvements de foule, replis identitaires. Et il est devenu évident que le marché (pas celui de Noël, l’autre) a fait main basse sur l’esprit de la fête pour en faire un gigantesque business et pour imposer son calendrier afin que les rayons des grandes surfaces ne désemplissent pas. Il n’empêche que le plaisir de la fête et le rôle social indispensable qu’elle remplit restent intacts… à condition d’y avoir accès. En effet, de nombreuses personnes en sont exclues par manque de liens sociaux ou de revenus, et les inégalités sociales croissantes laissent aussi des traces : d’un côté, des fêtes démesurées où l’argent et le champagne coulent à flots, de l’autre ceux qui doivent se contenter de regarder le spectacle, seuls chez eux devant leur TV ou devant une tasse de café au restaurant social.
On peut aussi, plus philosophiquement, se poser la question du sens de la fête, au-delà du fait qu’elle apporte toujours du baume au cœur, renforce les liens sociaux, familiaux, culturels, et parfois même le combat politique. Le film « Le sens de la fête » (qui a inspiré le thème de ce dossier, ndlr !) joue sur l’ambiguïté de cette expression : soit elle interroge le sens -la signification- de la fête, soit elle fait l’éloge de celles et ceux qui ont « le sens de la fête » au même titre qu’on peut avoir le sens de l’humour. Nous avons choisi les deux approches…
Sur ces belles paroles, le Comité de rédaction vous souhaite d’excellentes fêtes de fin d’année à toutes et tous…
Monique Van Dieren
SOMMAIRE
La fête, le soleil et les ombres. P.3–6
Même si elle prend des formes multiples et des significations différentes, la fête est présente dans toutes les civilisations, dans toutes les sociétés humaines. La participation à une fête est rarement le fait du hasard. Elle marque souvent l’appartenance à un groupe déterminé. Les fêtes ouvrent aussi la voie à des autorisations exceptionnelles…
Cadeaux: le grand déballage. P.7–9
Beaucoup déplorent aujourd’hui le côté « commercial » de la fête. La pratique du cadeau plante ses racines dans l’histoire ancienne. Le cadeau n’a pas attendu la société de consommation pour mettre du lien « matériel » entre les humains. A l’heure où tout s’achète et tout se vend,ce qui se joue entre donneur et récepteur va au-delà d’une valeur marchande.
Interview – Esperanzah: conjuguer fête et engagement. P.10–13
Jean-Yves Laffineur est directeur et programmateur artistique d’un grand festival qui rassemble chaque année des milliers d’oreilles, de cœurs et d’yeux ouverts sur la diversité du monde : Esperanzah. Un nom plein de promesses inspiré du deuxième album solo1 de Manu Chao, un fidèle du festival. Invitation au voyage plein de grandes bouffées d’un autre monde… meilleur.
10 zaskouskis philosophiques. P.14–16
Réfléchir à propos de la fête semble un contresens. La fête, justement, c’est un moment où on arrête de « se prendre la tête ». C’est le contraire de l’effort intellectuel … EN un mot, la fête est une délivrance. On se libère provisoirement de quelque chose… De beaucoup de choses, même. Mais de quoi au juste?
Mani-fêter dans l’air du temps… lourd. P.17–19
Quiconque a arpenté les rues d’une grande ville avec d’autres, brandissant des calicots et clamant des revendications porteuses d’autres possibles, a pu ressentir l’émotion le submerger, l’énergie le porter pour déplacer les montagnes des injustices… Émotion, communion, espoir d’un monde meilleur. Tout à la fois. Car parfois, s’engager pour une cause, c’est fêter ensemble l’utopie à venir.
Prix au n° : 4€ + frais d’envoi
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