Palestine : Visages de la résistance (Contrastes, avril 2018)
VIOLENCES D’ETAT
Lorsque j’étais enfant, on ne parlait guère de la Palestine. Sur les cendres du traumatisme de la Shoah, les adultes évoquaient Israël comme un Etat modèle et démocratique. Les références religieuses ne manquaient pas avec l’éternel refrain de David contre Goliath, d’Israël parvenant à vaincre la coalition des Etats arabes. Dans ce type d’images, il n’y avait guère de place pour les Palestiniens. A la fin des années 60, une série d’attentats sont menés par différentes factions palestiniennes. La presse occidentale parle alors de terrorisme. C’est ainsi que sont qualifiés les actes de résistance du peuple palestinien qui, depuis 1948 et la proclamation de l’Etat d’Israël, a subi de multiples formes de violences de la part de l’Etat d’Israël.
Antisémitisme ou antisionisme ?
Nous savons où a mené l’antisémitisme, à la haine des Juifs. Dans l’histoire de l’Europe, tant à l’est qu’à l’ouest, elle a donné lieu à de multiples dérives et des persécutions inacceptables dont la plus terrible est, sans aucun doute, la « solution finale » du régime nazi visant à exterminer le peuple juif.
L’antisionisme ne prône nullement cela. Pour certains auteurs, le sionisme est le droit du peuple juif à « s’établir sur ses terres », l’antisionisme est assimilé au rejet de l’installation des Juifs « en leur terre » et à l’existence même de l’Etat d’Israël. Pour d’autres, il faut le comprendre comme un total désaccord avec la politique menée par Israël. Nous le verrons dans ce numéro, le peuple palestinien subit, au quotidien, des mesures de réduction de ses droits et de répression. Il vit dans un territoire occupé par l’armée israélienne mais aussi par des « colonies de peuplement ».
Dans de nombreux pays, et pas uniquement dans les pays arabes, le sionisme n’est pas le retour à la terre promise mais l’expression de la domination politique et militaire de l’Etat d’Israël à l’encontre des populations palestiniennes. La confusion des termes souhaitée aussi par les autorités israéliennes est destinée à empêcher toute critique à l’encontre de l’Etat d’Israël.
A la rencontre de la « société civile »
Si l’occupation israélienne rythme le quotidien des Palestiniens, on peut par contre se réjouir de la vigueur et de la diversité du tissu associatif palestinien.
Outre les éléments politiques incontournables quand on évoque la situation de la Palestine, nous évoquerons aussi, dans ce dossier, des réalités de la société palestinienne : les femmes, les jeunes, les travailleurs… mais aussi le travail des associations qui agissent dans le quotidien avec la population. L’occupation entraîne de nombreuses conséquences mais provoque aussi des lésions psychologiques spécifiques. C’est de ce dernier aspect et du « travail de réparation » que nous parlera Samah Jabr, psychiatre et écrivaine.
Alors que nous bouclions ce numéro, les marches pour le droit au retour à la frontière entre Gaza et Israël ont provoqué des dizaines de morts et des centaines de blessés.
Les quelques lignes de ce dossier ne vont sans doute pas changer la situation du peuple palestinien. Mais les prises de conscience constituent toujours les premiers pas essentiels d’une démarche citoyenne…
Paul Blanjean
Sommaire
p.3 – Politique : La victoire de la politique du fait accompli
Dans les territoires occupés, la réalité coloniale consacre sur le long terme la logique d’apartheid, qui rend plus improbable que jamais toute perspective de paix fondée sur la justice.
p.6 – Politique : Les trois vies de Jérusalem
Dans l’inconscient collectif, mais sans doute aussi individuel, Jérusalem sonne comme une chanson, comme un film, un souvenir réel ou imaginaire. Dans le réel, plusieurs regards sont possibles. Nous en évoquerons trois : celui des touristes, celui des pèlerins, mais surtout celui du quotidien au coeur de la vie mais aussi des conflits et des projets politiques.
p.8 – Entretien : Soigner les blessures de l’âme
Samah Jabr est psychiatre et écrivaine. Elle vit à Shufat en banlieue de Jérusalem et travaille en Cisjordanie. Elle est issue de la première promotion en médecine de l’université palestinienne d’Al Quds (Jérusalem), elle est l’une des vingt psychiatres à pratiquer actuellement en Cisjordanie.
p.12 – Femmes : une discrimination à multiples visages
Derrière le colonialisme et les discriminations racistes instaurées par l’Etat d’Israël se trouvent une autre oppression et une autre violence venant de la société palestinienne elle-même à l’encontre des femmes. Ces deux dynamiques s’entretiennent pour créer une situation complexe qui traumatise psychologiquement les femmes.
p.14 – Protection sociale : Le travail cadenassé par l’occupation
En Palestine, les conditions de travail sont difficiles et les droits sociaux (droit du travail et sécurité sociale) sont bien souvent théoriques. En réalité, ils sont très différents selon l’administration qui contrôle le territoire où l’on travaille. Pour les travailleurs et les syndicalistes palestiniens, la priorité reste le combat contre l’occupation israélienne.
p.18 – Résistance : La peur comme mode de vie
Des militants et des travailleurs du MOC sont partis en Palestine en octobre 2017 et y ont rencontré de nombreux acteurs de la société civile palestinienne. Si nous avons surtout analysé la situation du conflit du côté de la Palestine, rappelons que certains Israéliens sont aussi victimes d’un régime autoritaire et militariste.
Prix au numéro :
(2 €+ frais d’envoi)
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