Remettre les pendules à l’heure de la réduction du temps de travail ( Contrastes décembre 2016 )
Un chantier pharaonique ?
Comme la sécurité sociale, la réduction du temps de travail serait-elle un luxe du siècle passé ?
Effectivement, la conquête du temps par la classe ouvrière qui travaillait plus de 60h/semaine a commencé au début du siècle passé. Mais cette conquête s’inscrit dans un temps long et s’est poursuivie en particulier dans les années ´50 grâce à une forte hausse de la productivité. Cela paraît logique.
Sauf qu’aujourd’hui, à l’heure où l’on connaît également une hausse de la productivité grâce au développement des nouvelles technologies ainsi qu’un taux de chômage très élevé, la réduction collective du temps de travail est perçue par les milieux patronaux comme une hérésie. En réalité, c’est le mot “collectif” qui les dérange profondément.
Car la réduction du temps de travail, elle se fait déjà… mais à leur sauce : temps partiel, flexibilité sous toutes ses formes, chô- mage élevé…
La réduction du temps de travail négociée collectivement est passée à l’arrière-plan, au profit de formules individualisées et négociées sectoriellement.
Les politiques glorifient le travail comme une vertu en soi ; on se souvient du slogan martelé par Sarkozy « Travailler plus pour gagner plus ». L’idée que la RCTT est inapplicable et impayable en temps de crise percole également dans l’opinion publique et prend la forme de formules stigmatisantes telles que “le monde appartient à ceux qui se lèvent tôt”.
Or, l’évolution du marché du travail montre que la question n’est plus “Faut-il ou non réduire le temps de travail”, mais “Comment le réduire” ?
De façon inégalitaire et en dérégulant le marché du travail, c’est-à-dire en permettant les heures supplémentaires, négociées (ou imposées) au sein de chaque entreprise, en généralisant la flexibilité (la loi Peeters) dans le seul intérêt de l’employeur ?
Ou de manière collective dans le but de “retrouver le cap du progrès social”, comme le suggère Marie-Hélène Ska dans son interview ? Les syndicats, les partis politiques de gauche et le monde associatif font le choix de la deuxième option, et la plupart d’entre eux remettent cette revendication dans leurs priorités.
Il y a une forte convergence pour affirmer :
• Qu’elle est indispensable pour lutter contre le chômage, redonner un sens au travail, partager les gains de productivité de plus en plus inégalement répartis ;
• Qu’elle est applicable au sein des entreprises si une marge de manœuvre est laissée aux secteurs d’activités de choisir les formules qui leur conviennent le mieux. Bien que critiqué, l’exemple des 35h en France le prouve ;
• Qu’elle est un outil créatif pour répondre aux évolutions des métiers et de l’emploi ;
• Et qu’elle est payable en combinant plusieurs sources de financement (les entreprises, l’Etat, et dans une moindre mesure les travailleurs et les consommateurs).
A l’heure du néolibéralisme triomphant, ce chantier peut sembler pharaonique. Mais les Egyptiens ont réussi à construire les pyramides. Nous, “il nous suffit de” convaincre le politique de suivre simplement la voie du bon sens…
Sommaire
p3 – Histoire : Maîtriser le temps, partager le travail
Réduire collectivement le temps de travail, c’est toute une histoire ! Celle d’un Mouvement ouvrier en lutte pour conquérir du temps libre et faire baisser le chômage. Elle n’est pas achevée. En face, un adversaire patronal qui n’aspire qu’à la flexibilité, un autre nom pour l’exploitation.
p6 – Débat idéologique : Les 5 verrous anti-RCTT
Jusqu’à très récemment, on aurait pu croire que la réduction collective du temps de travail (RCTT) était un horizon politique définitivement clos. Aujourd’hui, ouf, le débat est rouvert. Mais l’argumentaire anti-RCTT se porte plutôt bien. Voyageons parmi quelques arguments souvent mis en avant.
p10 –Interview : Retrouver le cap du progrès social
Après avoir mis la RCTT en mode “pause” pendant de longues années, les organisations syndicales lui redonnent une place centrale. Pour Marie-Hélène Ska, au-delà d’une réflexion sur les formules d’aménagement ou les pistes de financement, c’est la notion de progrès social qu’il faut remettre en chantier.
p13 – France : Ils l’ont fait !
Le marché du travail connaît aujourd’hui de grands bouleversements. La RCTT peut être vue comme une opportunité pour le réformer en profondeur. Mais une telle option est-elle possible sur le plan de l’organisation du travail ? Nos voisins français l’ont déjà expérimentée.
P17 – Financement Impayable, la RCTT ?
La RCTT serait impayable, selon ses plus ardents opposants. Et elle ruinerait à tout jamais la compétitivité de nos entreprises. Mais a-t-on encore vraiment le choix ? La question ne doit donc pas être Oui ou Non, mais Comment ? Des pistes de financement sérieuses sont sur la table.
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